Présentation du site des marais, dunes et baies de Guissény et du projet de Réserve naturelle régionale

Le site naturel” marais, dunes et baies de Guissény” proposé au classement en Réserve naturelle régionale se situe dans le Finistère au nord-est de Brest. Il couvre trois communes : Guissény, Plouguerneau et Kerlouan et deux communautés de communes, la Communauté Lesneven Côte des Légendes (CLCL) et la Communauté de communes du Pays des Abers (CCPA). 

Ce site remarquable est caractérisé par une zone côtière basse bordée par le plateau léonard. Il regroupe plusieurs entités écologiques majeures : les baies de Tresseny et de Porz Olier, de larges estrans et plusieurs îlots, le cordon dunaire de la Sècherie et l’arrière-dune du Vougo, l’étang et les marais du Curnic, les prairies humides, les tourbières et la falaise morte. Ce territoire se distingue par un continuum terre-mer naturel unique et une mosaïque d’habitats naturels façonnés par l’Homme au fil du temps, ce qui génèrent une biodiversité exceptionnelle. 

La richesse des habitats du site s’observe aussi bien au travers de ses 124 ha d’habitats d’intérêt communautaire terrestre (au titre de la Directive européenne Habitat Faune Flore), que de ses prairies riches en orchidées abritant faune et flore exceptionnelle. Parmi les nombreux habitats marins d’intérêt, deux d’entre eux peuvent retenir une attention particulière : les herbiers à zostères et les champs de blocs. En termes de diversité floristique, 605 plantes vasculaires sont connues à ce jour sur le site dont 30 taxons considérés à enjeux de conservation. Ces derniers sont principalement présents dans le marais et l’arrière-dune du Vougo. Le site accueille notamment le Liparis de Loesel (Liparis loeselii), une espèce d’orchidée inscrite à l’annexe II de la Directive Habitat Faune Flore, dont la variété ovata est particulièrement rare en Bretagne, n’étant observée que sur deux sites dont Guissény. 

Pour la faune, le site est remarquable pour la grande diversité d’oiseaux accueillie tout au long de l’année avec 83 espèces nicheuses (dont 18 considérées comme patrimoniales) et 121 espèces hivernantes et migratrices (dont 46 patrimoniales). Ce sont surtout l’étang du Curnic et les estrans qui accueillent les anatidés et les limicoles en halte migratoire et en hivernage. Les réseaux de mares temporaires et permanentes, ainsi que les vastes zones humides favorisent la présence de nombreux amphibiens (11 espèces présentes) et reptiles (5 espèces). Ces milieux abritent également 28 espèces d’odonates (libellules et demoiselles), soit plus de la moitié des espèces recensées en Bretagne, dont deux à enjeux de conservation : l’Agrion de mercure (Coenagrion mercuriale) et l’Agrion exclamatif (Coenagrion pulchellum). 12 espèces de mammifères terrestres dont trois patrimoniales ont été recensées sur le site et plusieurs mammifères marins sont observés sur le littoral, dont le Phoque gris (Halichoerus grypus). Les autres groupes (notamment poissons et invertébrés autres qu’odonates) sont encore peu connus et feront l’objet d’inventaires et de suivis dans le cadre de la Réserve. Par ailleurs, le site présente plusieurs éléments géologiques ponctuels d’intérêt : les tors granitiques des Barrachou, la falaise morte, les queues de comètes, la coupe de la falaise du Vougo, les tourbes fossiles Gwenn Drêz notamment. Ces différents éléments offrent une certaine compréhension des variations des milieux marins au fil du temps, notamment dans un contexte d’élévation du niveau marin. Le site est aujourd’hui un observatoire du changement du trait de côte. Depuis 2004, un suivi morpho-sédimentaire du système dune-plage du Curnic au Vougo est mené à ce titre par le Laboratoire LETG Géomer. 

L’occupation humaine du site est ancienne, comme en témoignent les nombreuses traces archéologiques, d’activités, d’aménagements et de constructions, qui constituent également un patrimoine historique et culturel notable. Pour la période récente, citons notamment l’activité goémonière pratiquée sur la Sécherie depuis le 18ème siècle, puis les travaux de poldérisation au 19ème siècle permettant l’installation d’une activité de polyculture-élevage dans le marais. S’en est suivie une phase d’intensification de certaines pratiques dans les années 60, 70 et 80 (avec notamment l’extraction de sable) qui ont ensuite progressivement décliné. Parallèlement, les activités touristiques et récréatives se sont développées sur tout le secteur. Puis les phénomènes de marées vertes sont apparus.  

La prise de conscience des multiples intérêts patrimoniaux du site naturel ont conduit dans les années 90 à la création de l’association Guissény Rendez-vous Nature et à la mise en place de mesures de protection. Un arrêté de protection de biotope est notamment pris en 1997, année qui voit aussi le début des acquisitions foncières par le Conservatoire du littoral. Ces premières acquisitions seront complétées au fil des ans par le Conservatoire et la commune de Guissény. Dès les années 2000, le site rejoint le réseau Natura 2000. Cela permet la mise en place de suivis naturalistes et scientifiques et une gestion conservatoire du site. Le développement des connaissances et leur valorisation à travers des outils d’éducation à la nature, coordonné par la mairie de Guissény, se poursuit à l’aide de contrats nature du Conseil régional (2004 – 2009). Parallèlement, le Conservatoire du littoral lance des travaux pour créer une maison de site et la mairie prend en main la problématique très concrète des risques littoraux. En 2017, le projet de Réserve naturelle régionale émerge. Il est officiellement sélectionné par le Conseil régional en 2021, dans le cadre de l’appel à manifestation pour le développement du réseau des Réserves naturelles régionales bretonnes. 

À partir de 2022, une démarche de concertation pour la préfiguration de la Réserve se développe, réunissant tous les acteurs du territoire : riverains, représentants d’usagers, professionnels du tourisme, organismes experts, services de l’État, services des collectivités territoriales et élus. Cette concertation a permis d’installer le dialogue, de partager les connaissances, analyses et visions, de co-construire le projet et de rechercher des accords entre des acteurs aux intérêts parfois distincts. D’une durée de deux ans, cette démarche a été coordonnée par la mairie de Guissény, avec l’appui du Conseil régional. Elle s’est organisée autour de 17 réunions (de comité de pilotage, de comité technique, de groupes de travail thématiques, de réunions bilatérales, etc.) ayant réunis près d’une centaine de personnes au total.  

Le projet ainsi co-construit propose un périmètre, une réglementation, des orientations de conservation et de gestion et une gouvernance pour la future Réserve naturelle régionale.  

  • La surface proposée au classement, à ce jour de l’animation foncière, couvre 605,22 ha dont 200,65 ha de surface terrestre. Les propriétaires principaux sur le domaine terrestre sont publics : il s’agit du Conservatoire du littoral, de la Commune de Guissény et du Département du Finistère, des propriétaires privés ont également donné leur accord de principe pour le classement de 4 ha de terrain. Sur le domaine maritime, l’Etat est le seul propriétaire (cf. carte jointe).  
  • La réglementation proposée sur ce périmètre vise à maintenir et encadrer les pratiques et usages afin de garantir la conservation et l’évolution des populations végétales, animales et des habitats présents. Elle a été élaborée lors de la démarche de concertation sur la base des enjeux identifiés localement, et conformément aux recommandations de Réserves naturelles de France (RNF) et du guide d’élaboration des réglementations pour les Réserves naturelles régionales bretonnes. 
  • Les grandes orientations de conservation et de gestion de la future Réserve sont élaborées pour les 4 grands enjeux écologiques identifiés (étang, marais, dépressions ; habitats dunaires ; estran, falaise, ilots  et falaise morte), les 2 enjeux patrimoniaux (archéologique ; historiques et culturels) et les enjeux transversaux (sensibilisation, éducation ; acquisition de la connaissance ; adaptation au changement climatique et anticipation des risques littoraux ; qualité de l’eau ; ancrage territorial).  
  • En termes de gouvernance, la mairie de Guissény, porteuse du projet, se positionne en tant que gestionnaire de la future Réserve, avec la volonté de mutualiser les instances et documents de gestion Natura 2000-terrains du Conservatoire du littoral-Réserve. Un conseil scientifique dédié ou mutualisé avec d’autres Réserves littorales est souhaité pour l’accompagnement de l’organisme gestionnaire et du comité consultatif de gestion.