Qui dit Breton dit Bruxelles…

Depuis la rentrée, des cours de breton hebdomadaires sont proposés à Bruxelles par l’Union des Bretons de Belgique avec le soutien de la Région Bretagne. Comme les autres langues celtiques vivantes, le breton connaît un regain d’intérêt à l’international, notamment grâce à de nouveaux outils mis en place, comme la plateforme Desketa.bzh. Mais en présentiel, le breton passe aussi par Bruxelles.

Cours de breton à Bruxelles par l'Union des Bretons de Belgique
Crédit photo : Cours de breton à Bruxelles par l’Union des Bretons de Belgique

Connus pour leur sens de la fête, leurs joutes gastronomiques et leur capacité à réseauter à travers des événements à la fois bretons et cosmopolites, des Bretonnes et Bretons du Monde s’intéressent aussi à la langue bretonne. A Hambourg, Montréal, Ho-chi-Minh, Bratislava, Aberystwyth, Saint-Jacques de Compostelle ou encore Bruxelles, ils font connaître la langue, à travers la poésie, le chant, des publications et participent même à la Redadeg.

Éloignement ? Envie de se reconnecter à la Bretagne ? De se réapproprier une partie de sa culture en se sentant peut-être moins soumis aux préjugés ? Projet longtemps reporté ? Les raisons sont sans doute multiples, mais une partie des Bretonnes et Bretons installés à l’étranger ressentent davantage le besoin de découvrir ou redécouvrir la langue bretonne qu’avant leur départ.

C’est le cas de Thierry Péron, originaire du pays de Lorient, qui s’est inscrit aux cours de breton proposés à Bruxelles depuis la rentrée par l’Union des Bretons de Belgique : « Je me suis dit qu’il serait intéressant de comprendre et de parler un minimum le breton, histoire de relier à un ensemble les quelques expressions apprises de ma mère et de ma grand-mère maternelle, et par curiosité aussi, afin de voir si cette langue, celle de mes ancêtres, me plaît et me correspond. Si je vivais en Bretagne de manière permanente, je ne sais pas si l’idée m’en serait venue. »

Ils sont une quinzaine à avoir saisi au vol la proposition de cours de breton faite par l’Union des Bretons de Belgique. « Tout se passe dans une ambiance très agréable grâce au style de notre intervenant, Guto Rhys, explique Olivier Le Dour, à l’origine du projet. Guto est très vivant, informel et convivial, raconte beaucoup d’anecdotes et ouvre des parenthèses sur l’origine des mots, fait des comparaisons avec le gallois, sa langue maternelle ». Diplômé en études celtiques à Rennes, 2, Guto Rhys a devant lui une majorité de Bretons expatriés dans la capitale de l’UE, mais aussi deux compatriotes gallois, une Provençale ou encore une Franco-russe.

Pour Anne Le Bras, traductrice, «  il était exclu de passer à côté du breton. Je souhaitais commencer depuis des années, mais se trouver des cours à distance ou en présentiel en Bretagne, c’est plus compliqué et chronophage, tandis qu’un cours du soir à Bruxelles, c’est parfait. »

Gwenaëlle Diquélou, originaire de Pont-Aven, vit pour sa part à Bruxelles depuis presque 30 ans. « Je trouve çà épatant de pouvoir suivre ces cours. Je ne pensais pas du tout que la Région Bretagne serait intéressée par ce type d’initiative. Cela montre que les temps changent. J’ai 62 ans et lorsque j’apprenais le Bretons à Rennes 2 dans les années 80, le contexte était très différent ».

C’est par la danse que Corinne Prigent, dont le père parle breton de naissance, est venue au cours de langue. « Nous avons vécu dans le sud, puis en Norvège et maintenant en Belgique. Je pense que les cours de danse et de langue bretonne me pousseront à revenir plus régulièrement en Bretagne. »

Rompus à la gymnastique des langues, les participants apprécient aussi de pouvoir étudier une langue celtique dans un univers dominé par langues latines et germaniques. « Guto nous offre une mine d’infos socio-culturelles, historiques et linguistiques, ajoute Anne Le Bras.  Sans parler des comparaisons avec le gallois et d’autres langues celtiques, ce qui nous permet de situer et de distinguer le breton dans sa famille de langues.”

Après six semaines de cours à l’école Ernest Richard de la commune bruxelloise d’Etterbeek, à raison d’une heure et demie par semaine, le voile se lève peu à peu sur les mystères, mais aussi les difficultés du breton.  « Je la trouve belle et difficile d’accès, comme certaines fleurs sauvages », s’amuse Anne Le Bras, citant ses « divines » mutations des consonnes et ses pluriels. « Elle est mystérieuse par son étymologie qui se perd parfois dans la nuit des temps. Avec des sonorités rudes et douces, imagée et poétique, mais concise et économe. Je n’aurai pas le temps de la maîtriser, mais en connaître un bout suffira à mon bonheur. »

 « Je dois dire que je suis plutôt agréablement surpris, explique Thierry Péron, en particulier par la construction des phrases, qui vont toujours droit au but. Cela cadre bien avec l’image que je me fais de mes compatriotes : francs, directs et sans fioritures. » Un enthousiasme qui conforte Olivier le Dour, historien breton, auteur de plusieurs ouvrages sur la diaspora bretonne, à Bruxelles, mais aussi aux États-Unis, à l’origine de cette initiative.

De passage à Bruxelles, ne vous étonnez donc pas si Anne vous salue par un « Penaos emañ ar bed hirio * ou si Thierry vous lance Gleb eo an amzer ! Et si Stromae, le chanteur bruxellois originaire du quartier, lui lance son célèbre Alors on danse !, c’est sans doute en dégainant son expression bretonne favorite que Corinne lui renverra un joyeux « deomp da zansal ! »

*« Comment va le monde aujourd’hui » ?

* Le temps est humide aujourd’hui »

* Allons danser !